Mes petits-enfants assis autour de moi, nous contemplons l’horizon du haut de la colline de Siou Blanc. L’aînée me demande (pour la énième fois) de leur raconter comment nous avons réussi à endiguer le réchauffement climatique, sauver les forêts, continuer de boire de l’eau potable… Je regarde passer une famille de sanglier, les marcassins commencent à changer de pelage. Même eux avaient été menacé d’extinction. “Allez Mamé, dis à Papé de raconter, s’te plaît !”
Ma voix grave conte le récit de ces hommes et ces femmes qui, face aux défis qui se dressaient devant eux ont décidé de rendre nos modèles d’entreprises, notre économie et nos modes de consommation responsables.
Pourquoi, Papé ?
Parce que nous avions oublié que nous devions nourrir la terre qui nous nourrit. Que l’argent ne se mange pas. Notre Terre était en train de mourir et nous avec. Nous avions réussi en moins d’un siècle à épuiser nos réserves naturelles et rendre l’air irrespirable.
Pourtant les civilisations passées nous avaient mis en garde. Les Mayas et leur calendrier : 2012 ne sonnait pas la fin du monde mais la fin d’un monde. Celui de l’obsolescence programmée. Eux qui, comme les Egyptiens, les Grecs et bien d’autres avaient vu leurs modèles économiques et sociétales durer plus de 1.000 ans et dont l’histoire garde encore des traces de leur héritage.
Vous avez fait quoi Papé ?
Une entreprise a le devoir de créer de la richesse (et non l’accumuler) et prendre en compte les problématiques environnementales, sociétales et économiques qui gravitent autour de son écosystème. Les pouvoirs publics ne pouvaient pas répondre à tout. Nous devions faire notre part.
C’est comme ça qu’est née la RSE ?
La responsabilité sociétale des entreprises existait depuis longtemps déjà, elle est issue de l’économie sociale et solidaire, modèle économique qui date de 1835. C’est la crise financière de 2008 qui nous a mis en avant ce modèle économique. Toutes les entreprises qui avaient résisté et qui se développaient de +10% tous les ans avaient un point commun, quelles qu’aient été leur taille, leur structure, leur activité partout dans le monde.
Un modèle économique R.S.E.
Alors vous avez fait comme eux ?
Crises à répétition, scandales nutritionnels, dérèglement climatique, chômage et précarité nous imposaient cette voie sous peine de disparaître. L’O.N.U avait créé les 10 engagements du Global Goals, véritable support sur lequel beaucoup d’entre nous se sont appuyés.
La génération de vos parents qui était en rupture totale avec notre manière de faire nous a beaucoup appris. On aurait dû les écouter. Economie de la fonctionnalité pour l’éco-conception mais pas que. La permaculture nous a permis d’obtenir des rendements supérieurs à la monoculture intensive même sans pesticide. L’économie circulaire nous a appris à transformer nos déchets en ressources. Réduire notre empreinte carbone en repensant notre mobilité. S’inspirer du biomimétisme de la nature ou chaque être vivant a sa place.
Et notre plus grand défi : l’empreinte carbone numérique. L’internet et ses serveurs qui surchauffent ! Sais-tu que 10 petits serveurs polluent autant qu’un Boeing 747 qui fait Paris-Boston aller/retour ? Réapprendre à s’écouter les uns les autres, prendre conscience de notre “potentiel intérieur”, faire émerger des idées nouvelles pour servir plus grand que soi, être heureux au travail, considérer l’autre comme un être humain…
Nous avons osé le bien-être au travail (management bienveillant, gouvernance participative, relation client, QVT, naturothérapie, sophrologie, méditation, sieste). L’entreprise considérait ses collaborateurs et collaboratrices non plus comme de simples exécutants avec un diplôme mais comme une véritable personne à part entière avec des idées qui feront grandir l’entreprise. La vision holistique de notre humanité donna naissance à une croissance et un développement économique sans précédent et illimité (la valeur immatérielle) aux antipodes d’un modèle basé sur une croissance matérielle aux quantités limitées. Même les banques s’y sont mises en cessant d’investir dans des projets miniers et en soutenant les monnaies locales.
Et ça à marché ?
Il faut en moyenne 18 mois pour rendre une entreprise économiquement viable grâce à un modèle économique responsable. Il y a encore beaucoup à faire, mais nous avons réussi à endiguer le réchauffement climatique, les gens ne partent plus travailler la boule au ventre, l’air est plus respirable et notre nourriture plus saine. Notre économie est florissante, nos entreprises performantes dans le cercle vertueux de l’amélioration permanente portant ainsi bon nombre de réponses aux problèmes de santé publique et environnementale.
Alors, ça y est, on est sauvé ?
Mon grand-père goûtait la terre pour savoir ce qu’il allait planter ou pas. “Elle nous parle, apprends, tant que tu écoutes ce dont elle a besoin, elle t’écoutera et te donnera ce dont tu as besoin”. Il en va de même pour une entreprise et nos modèles de sociétés, les hommes et les femmes qui les composent. Nourrir mon entreprise pour qu’elle me nourrisse.
Restez vigilant les enfants. C’est une épreuve que nous a imposé notre terre Gaya. Nous devons retenir sa leçon.
Promis, Papé !