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De funès, petites anecdotes sur une grande vie

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A l’occasion du centenaire de la naissance de Louis de Funès, Jean-Marc Loubier, écrivain et journaliste, publie une passionnante biographie du gendarme de Saint-Tropez. On y découvre les petites et grandes vadrouilles d’un des acteurs préférés des Français.

Vous aviez déjà publié, en 1991, une biographie de Louis de Funès, aux éditions Ramsay. Pourquoi y revenir aujourd’hui ?
Tout simplement parce que je ne la trouvais pas bonne ! Je n’avais pas eu la possibilité de m’appuyer sur les témoignages de la famille. C’est pour cette raison qu’avec mon éditeur, Robert Laffont, nous nous sommes dit que le centenaire de la naissance valait le coup d’être marqué par l’écriture d’une biographie dense et conçue à partir des éclairages de la famille. Après le premier livre, la famille m’a ouvert les portes, il a été plus facile pour moi de travailler. L’année dernière, cinq livres sont sortis pour les trente ans de la mort de Louis de Funès. Nous avons préféré attendre un an pour le centenaire de sa naissance.

Vous évoquez un long travail d’enquête…
J’ai mis un an et demi pour rédiger le livre. J’ai lu beaucoup de choses mais j’ai surtout eu le privilège de rencontrer une cinquantaine de personnes qui ont bien côtoyé Louis de Funès. Parmi les témoins privilégiés, ses deux enfants, Olivier et Patrick, mais aussi sa femme, Jeanne. Je ne suis pas un fan de Louis de Funès, je n’ai pas une approche hagiographique mais la vie de grands comédiens est passionnante.

C’était un homme secret, à tel point que beaucoup de rumeurs ont couru sur lui…
Avant d’arriver au sommet, il a beaucoup galéré. Il n’aimait pas les interviews et protégeait énormément sa famille. Dans les entretiens qu’il accordait, il ne parlait que de ses films. Après Rabbi Jacob, il a déclaré : « Ce film m’a décrassé l’âme ». Certains ont donc imaginé qu’il était d’extrême droite. Or, il était proche du Front populaire en 36, admirateur de Léo Blum. Puis, quand il fut désillusionné de la gauche, il devint un gaulliste bon teint. Ce que tout le monde ignore, c’est qu’il était farouchement opposé à la peine de mort. Il n’aimait pas beaucoup Mitterrand mais il louait en permanence son courage sur ce dossier. Très loin donc d’un homme très à droite !

Dans le Var, à Saint-Tropez, il incarne la figure mythique du gendarme…
Il a tourné six « Gendarmes ». La série commençait à le lasser et le dernier film, le gendarme et les gendarmettes, ne restera pas dans les mémoires. Avec tout le respect que j’ai pour Saint-Tropez, ce milieu n’était pas le sien. On lui a même proposé d’acheter un appartement au-dessus du célèbre Sénequier. Il a poliment refusé.

Pourquoi ce sentiment de retrait, d’isolement, notamment vis-à-vis du monde du cinéma…
De Funès était avant tout un comédien de théâtre, on l’oublie trop souvent. Oscar fut un grand succès théâtral avant de tenir le haut de l’affiche au cinéma. Un de ses amis personnels était Jean Anouilh, avec lequel il entretenait une relation épistolaire régulière. La comédie, pour lui, c’était du travail. Quand on l’arrêtait dans la rue en lui demandant de faire le pitre, il détestait. Il avait ce point commun avec Bourvil.

Les relations entre les deux hommes étaient-elles distantes ?
Non, c’est encore un fantasme. Ils se ressemblaient beaucoup, étaient tous les deux discrets. Et ils s’appelaient régulièrement. Un des enfants de Louis de Funès m’a raconté le jour où ce dernier a appris la mort de Bourvil. Il n’avait pas de nouvelles depuis quelque temps et avait décidé de l’appeler. Au domicile de Bourvil, on lui apprit que ce dernier s’était éteint dans la nuit. Il en a été très marqué, s’enfermant dans sa chambre, effondré. Bourvil et De Funès s’appréciaient beaucoup, sans pour autant se voir tous les jours !

Stéphane Menu

Jean-Marc Loubier. Louis de Funès, petites et grandes vadrouilles. Robert Laffont. 22,50 euros